Carpentras, Vaucluse (Nemini - Colonia Iulia Carpentorate Neminorum, Narbonnaise, Meminii)
Découverte à Carpentras
1828
indéterminé
Datation
type des Décennales : variante. Toutes dernières années du règne de Trajan voire début du règne d'Hadrien.
Analyse
D'après ROSSO 2006 : Rosso, E., L'image de l'Empereur en Gaule romaine. Portraits et inscriptions, Paris, 2006, p. 394-396.
La tête est cassée directement sous le menton selon un plan horizontal. L'extrémité du nez et celle du menton manquent, ainsi que le bord de l'oreille droite. Un éclat de marbre a sauté au-dessus de l'oeil droit, endommageant une mèche de la frange.
L'arrière de la tête présente un plan vertical scié, duquel dépasse un tenon de
marbre de section carrée ; le sommet du crâne est très plat. La tête est très légèrement penchée et tournée vers la gauche. Le globe oculaire est lisse,
les paupières supérieures profondément incisées et bordées d'un épais double trait ; le front est très bas et les sourcils froncés (deux fines rides traversent le front au-dessus du nez). La bouche, aux lèvres très minces, présente des commissures particulièrement profondes ; les plis naso-labiaux sont marqués par deux grandes rides. Les cheveux sont incisés de manière assez sèche ; le traitement est plus léger sur le sommet du crâne.
La physionomie particulièrement marquée de ce portrait permet d'y reconnaitre sans hésitation l'empereur Trajan : le front bas, la bouche mince et sinueuse et
les plis naso-labiaux très profonds sont tout à fait caractéristiques. Les traits du visage, qui sont ceux d'un homme avancé en âge, semblent le désigner
comme une effigie de la fin du règne: W. H. Gross propose effectivement de le dater des "dernières années de la vie de Trajan"(461). Mais, comme le note H. Jucker, la disparition d'une mèche au-dessus de l'angle interne de l'oeil droit empêche une appréciation exacte de l'indice capillaire et donc du type iconographique (462). Ici, la frange se caractérise par une série médiane de mèches peignées vers la gauche, encadrée à gauche par une pince largement ouverte et, à droite, par une fourche.
Du point de vue de la succession des types, le changement de direction d'une grande partie des mèches de la frange frontale de la droite vers la gauche intervient avec ce que l'on appelle commodément le type IV ou type des Décennales, parce qu'on a longtemps considéré que le prototype en avait été créé
pour commémorer la dixième année de règne de Trajan. En fait, on considère aujourd'hui que le triomphe sur les Daces de 107 ap. J.- C. constitue une meilleure occasion pour la création de ce type. L'indice capillaire comporte,
au sein de la rangée de mèches peignées vers la gauche, une pince très largement ouverte, à l'endroit précis où l'effigie de Carpentras est endommagée.
H. Jucker distingue en outre deux séries de variantes de ce type IV : la première (IV A), qui est représentée notamment par la tète d'Oslo, se démarque du groupe principal en ce que c'est une fourche et non une pince qui s'ouvre
au-dessus de l'oeil droit ; la seconde (IV B), à laquelle l'auteur rattache la tête de Carpentras, comporte une petite fourche à l'angle du front, du côté droit, et surtout, une pince au-dessus de l'oeil gauche ; il s'agit la d'une variante que Gross désigne du nom « d'Opferbildtypus» ou « type du sacrifice», dans la mesure où l'empereur est représenté suivant ce type sur une scène de sacrifice de la colonne Trajane où il apparait capite uelato. Elle se caractérise par une inclinaison de la tète vers la gauche et des traits vieillis, particularités que l'on retrouve effectivement sur le portrait de Carpentras.
Je la rapprocherais volontiers d'une tête conservée en Crète (Héraclion, musée, inv. 317) et considérerais qu'elle se rattache plutôt à la variante « de la tête d'Oslo », ainsi que semblent indiquer les mèches temporales et la fourche située au-dessus de l'oeil droit. Avec ces deux séries de variantes, on serait donc en présence d'une « actualisation du type IV datant des toutes dernières années du règne de Trajan, voire du début du règne d'Hadrien, ainsi que le suggère J.-Ch. Balty(464), adaptation pour laquelle il n'est pas nécessaire de supposer, selon
H. Jucker, la création d'un nouvel Urbild.