Personnage féminin assis

Réf. NEsp : NEsp, Fréjus, 2013, 060, p. 35-36. | Réf. Esperandieu : 03-2455
  • Personnage indéterminé (individu)
  • Chaussure ; Chiton ; Manteau ; Sandale
  • Statue
  • Ronde-bosse
  • Marbre
  • Visuelle
  • Marbre blanc translucide à grains fins.
  • Commentaire décor et traitement de surface
  • Ht : 104 cm ; Lg : 50 cm ; Ep : 55 cm
  • Cuvette d'encastrement parallélépipédique (longueur 7 cm ; largeur 4 cm)
  • Colossal
  • 86.2
  • Fréjus musée archéologique
  • Fréjus, Var (Colonia Pacensis Forum Iulii Octavanorum, Narbonnaise, Salyens )
  • Fréjus thermes de la Porte D'Orée à proximité du mur à absides de la natatio
  • 1828-1829
  • Thermes
  • Ier-IIe s. ap. J.-C. (1-199)
  • Stylistique
  • D'après Lemoine, Y., Satre S. (collab.), Fréjus, Nouvel Espérandieu IV, Recueil général des sculptures sur Pierre de la Gaule (H. Lavagne dir.), Paris, 2013, p. 35-36..
  • Statue colossale, de taille deux fois supérieure à la moyenne, représentant un personnage féminin assis, dont seule est conservée la partie inférieure. Conservée sur une hauteur de 1,04 m, il ne subsiste que les deux jambes et le pied droit. Le pied gauche, rapporté, n’existe plus. Seule une partie du plan d’assemblage piqueté est visible. On distingue aussi un élément d’une mortaise pour un goujon (résidus d’alliages ferreux en place).

  • Le personnage porte un himation recouvrant ses jambes. Le vêtement est rabattu sous le personnage et couvre les parties latérales arrière des jambes en formant des plis retombants. À gauche, on distingue quatre plis étagés, élargis à leurs retombées et recreusées ; à droite, l’étoffe est plus massive et relevée au bord. Les courbes des cuisses et la jambe gauche, disposée en avant, sont visibles à travers la draperie qui dessine, pour les cuisses, des plis étagés en escaliers et pour les jambes, des plis répartis en éventail. La dépression formée entre les deux jambes offre des plis plus profonds que ceux du drapé mouillé adhérent aux membres. Elle accentue l’impression d’animation du vêtement en jouant sur les contrastes lumineux entre les arêtes et les fonds du plissé.

    Une cuvette d’encastrement parallélépipédique (longueur 7 cm ; largeur 4 cm) placée sur le haut de la cuisse droite, deux dépressions concaves sur la cuisse droite, une quatrième de plan carré (1,2 cm de côté) disposée dans le creux du drapé courbe sous la même cuisse, témoignent de l’existence de plusieurs points d’appuis pour fixer un élément de nature indéterminée placé au-dessus des jambes (bras, étai, attribut…). Sous l’imposant himation, dépasse un fin chiton à plis rectilignes verticaux étroits dont la bordure retombe sur le même plan que le lit de pose plan. Les pieds chaussés de sandales (soleae) (202) dépassent de l’himation qui recouvre le pied droit jusqu’au cou-de-pied. La chaussure conservée a une semelle épaisse (5cm) et un lacet double, passant entre le gros orteil et le doigt voisin, les deux lanières en V étant réunies par une feuille cordiforme, comme dans un autre exemplaire de Vienne (203).

    La face arrière est constituée de quatre espaces. Une bande horizontale sommitale de 22 cm court sur toute la longueur, piquetée et en ressaut de plus de 3 cm, elle sert de lit d’assemblage au bloc mitoyen disposé contre la face arrière. Sous cet espace, deux bandes latérales verticales sculptées (larges entre 15 et 20 cm) correspondent à la draperie retombante de part et d’autre des hanches. Enfin, la surface située entre ces bandeaux est piquetée et forme un lit d’assemblage rectangulaire avec le bloc disposé à l’arrière, à l’emplacement d’un siège ou d’un trône que l’on imagine très probable.

    L’identification de cette œuvre comme une divinité ou un autre personnage féminin reste difficile car les parties conservées apportent peu d’indices. Héron de Villefosse et Thédenat en 1884, puis Aubenas en 1886, proposèrent les premiers rapprochements iconographiques.

    Aubenas avança trois hypothèses, Jupiter, une personnification de la Colonia Augusta et la divinité protectrice tutélaire de la colonie : « Quelques personnes […] croient que la tête de Jupiter [n°001] doit être rapprochée d’un fragment de statue, de proportions plus fortes que nature, conservé également à Fréjus. Ce morceau, qui représente la moitié inférieure du corps d’une statue drapée et assise, est aussi fort intéressant, mais il ne peut avoir appartenu à une statue de Jupiter. On connaît un certain nombre de marbres représentant Jupiter assis, sur lesquels le vêtement du dieu est généralement disposé d’une façon différente. Jupiter assis porte le plus souvent un manteau ou une draperie négligemment jetée, qui recouvre les jambes, laissant le haut du corps à nu […] Jupiter n’a pas ce double vêtement serré, qui devait recouvrir le corps tout entier et qui nous paraît plutôt appartenir à une divinité féminine […] Nous sommes très portés à croire que le fragment de Fréjus est la partie inférieure d’une statue assise de femme, à tête tourelée, représentant la ville elle-même, ou une Tutela, divinité protectrice de la ville. Nous ne possédons rien malheureusement de la partie supérieure, ce qui pourrait nous autoriser à émettre une opinion plus assurée. »

    Les mentions de cette œuvre dans la littérature archéologique postérieure à Aubenas confortent sa thèse. En 1898, Reinach reproduit une gravure de cette sculpture dans un chapitre rassemblant des « femmes assises ». En 1927, Donnadieu reprend l’identification précédente et précise : « Il s’agirait, en définitive, du Génie de la colonie de Forum Julii, mais en raison du manque de renseignements, ce n’est là qu’une hypothèse très vraisemblable. » Enfin, Blanchet la décrit comme une « statue de femme assise, marbre (mutilée, Tutela ?) ».

    S’il faut écarter, bien évidemment, le rapprochement avec Jupiter, l’identification de cette effigie matronale est délicate à assurer. Cette figure féminine présente des similitudes avec de nombreux personnages féminins assis, dont l’inspiration vient d’un modèle attique de la seconde moitié du ve siècle av. J.-C., appartenant au type de la « Mère des dieux » attribuée à Agoracrite (204), disciple de Phidias, et disposée dans le sanctuaire sur le côté ouest de l’agora de Rhamnonte. Au cours de l’époque romaine, on rencontre fréquemment ce type de représentation très codifiée au Ier et surtout au IIe siècle. Les comparaisons les plus probantes sont la statue de Livie découverte à Paestum et conservée au musée archéologique national de Madrid (205), qui est datée par A. Alexandridis du début de l’époque de Tibère, et la statue de Cérès du musée de Tripoli (206), très proche par l’attitude et le plissé des vêtements, datée de l’époque claudienne. On citera également la statue cultuelle du temple de la Magna Mater sur le Palatin (207), une statuette de divinité conservée au musée de Vicenza (208), une représentation de Déméter à la glyptothèque Ny Carlsberg de Copenhague (209), une statue de Junon au musée de Trèves (210) ou encore une statuette de Junon (ou Fortuna ?) conservée au musée Fitzwilliam de Cambridge (211).

  • Coste 1831; Caumont 1846, p. 527; Petit 1865, p. 239-240; Petit 1867, p. 356; Aubenas 1881, p. XIV; Héron de Villefosse, Thédenat 1884b, p. 53-55; Aubenas 1886, p. 12-15, n°2; Reinach 1897-1910, II B, p. 689, n°5; Epérandieu III (1910), 2455; Donnadieu 1927, p. 130-131, fig. 65; Blanchet et alii 1932, p. II, n°3; Gébara, Béraud 1990, p. 9, fig. 12; Rivet et alii 2000, p. 402-403, fig. 727a; Béraud, Gébara, Rivet 2008, p. 103; Lemoine 2011, p. 184, fig. 2; CAG 83/3 (2012), 8*, p. 201-202, fig. 256. 

  • (202) Goldmann 2001, p. 105-111.

    (203) NEsp. I, Vienne, 2003, n°200, pl. 169.

    (204) EAA I, s.v. « Agorakritos », p. 146-148 (M. -T. Marabini Moevs).

    (205) Cortez 1946, p. 145-148, fig. 1-8; LIMC IV, s.v. « Héra », n°111 (A. Kossatz-Deissmann); Alexandridis 2004, n° 23, pl. 10/1-2.

    (206) Alexandridis 2004, n° 38, pl. 12/4.

    (207) Musée du Palatin, inv. n° 425 523; Tomei 1997, n°128, p. 148 (Avec bibliographie).

    (208) Inv. n° EI-104; Galliazzo 1976, n° 14, p. 58-60.

    (209) Inv.. GNC n° 703; Poulsen 1951, p. 114-115, n° 141.

    (210) Binsfeld, Goethert-Polaschek, Schwinden 1988, n° 97a, p. 57-58, pl. 29.

    (211) Inv. n° GR.5.1850; Budde, Nicholls 1964, n°101, pl. 34.