Portrait d'Antonin le Pieux

Réf. Esperandieu : 01-0528
  • Tête (Tête colossale)
  • Ronde-bosse
  • Marbre
  • Visuelle
  • Marbre bleuté à grosses veines grisâtres
  • Gradine , Foret - Trépan
  • Les boucles de la barbe sont seulement ébauchées à la gradine. Boucles de cheveux individualisées grâce au creusement de canaux au trépan.
  • Ht : 64 cm
  • H. tête : 44 cm
  • Colossal
  • 30.003
  • Toulouse musée Saint-Raymond
  • Béziers, Hérault (Colonia Urbs Iulia Baeterra Septimanorum, Narbonnaise, Volques )
  • Découverte en 1844 à Béziers, rue P. P. Riquet, maison Gasc.
  • 1844
  • indéterminé
  • Type Formies : 138-161 ap. J.-C.
  • D'après ROSSO 2006 : Rosso, E., L'image de l'Empereur en Gaule romaine. Portraits et inscriptions, Paris, 2006, p. 361-362.
  • Le portrait est presque intact : hormis quelques infimes épaufrures sur les arcades sourcilières, aucune mutilation n'est à déplorer.
  • Il s'agit d'une tête à bouchon d'encastrement qui appartenait à une statue environ deux fois grandeur nature. Le portrait porte d'importants signes d'inachèvement : les boucles de la barbe sont seulement ébauchées à la gradine, dont on repère aisément les traces - des stries parallèles et un «piquetage » irrégulier -, de même que les mèches de la frange frontale : toutefois, celles-ci sont déjà individualisées, sur le front, par des canaux réalisés au trépan, et sur les tempes, l'outil a été employé pour l'évidement central de certaines boucles. Le visage est déjà bien lissé et les traits bien mis en place, au contraire du cou et de la nuque qui présentent d'innombrables petits trous de pointe et dont le volume n'avait pas atteint son aspect définitif ; les vues de profil sont particulièrement claires à cet égard, puisqu'on remarque l'épaisseur du cou, le bourrelet que forment les cheveux sur la nuque et le non-dégagement des oreilles de la masse du marbre. A l'arrière, un important éclat de marbre a sauté et on observe les marques d'un recreusement derrière les oreilles, de sorte que J.-Ch. Balty formule l'hypothèse selon laquelle cet «incident technique » a conduit à un stucage de l'ensemble de la partie postérieure, destiné à recomposer le volume adéquat du crâne (395). Ne pourrait-on pas songer aussi à un aménagement consistant en l'ajout d'un pan de toge rabattu sur la tête ? Cette œuvre pour le moins déroutante a suscité des réactions très diverses de la part des chercheurs : correctement identifiėe avec l'empereur Antonin le Pieux dès les premières publications, elle a par la suite été à plusieurs reprises l'objet de doutes concernant son authenticité ou encore sa valeur iconographique : c'est le cas notamment de M. Wegner qui, après avoir accepté cette identification, est revenu quelques années plus tard sur son opinion (396) ; F. Braemer la qualifiait encore récemment de "tête bizarre"(397). Ces jugements tiennent aux traces d'inachèvement évoquées ci-dessus, qui, parce qu'elles sont inhabituelles, ont conduit les savants à exclure le portrait de l'iconographie impériale pour des raisons de « non-conformité typologique », ou à mettre ces particularités techniques au compte d'une maladresse qui serait caractéristique des ateliers « provinciaux » : c'est ainsi que P. Zanker en vient à nier l'inachèvement même de l'effigie (398). Il est vrai que le matériau employé -un marbre (399), parcouru de veines grises ou bleutées, qui pourrait être pyrénéen( 400), ce que nie F. Braemer (qui y voit un marbre de l'Apennin (401)) -semble indiquer un atelier local ; mais qui dit œuvre « locale » ne dit pas nécessairement œuvre maladroite ou incorrecte typologiquement, et nous aurons l'occasion de voir à plusieurs reprises qu'il a très certainement existé en Gaule Narbonnaise des ateliers de grande qualité capables de produire des répliques parfaitement conformes à l'Urbild dont elles procèdent ; et ce portrait en fait certainement partie, comme l'a mis en évidence récemment J.-Ch. Balty (402). Je ne reviendrai pas ici sur la démonstration, ni sur le détail des différentes traces d'inachèvement qu'il est possible de déceler, mais rappellerai seulement qu'il est tout à fait possible de reconnaître ici les principales caractéristiques du « type Formies » : les arcades sourcilières tombantes, les rides d'expression du front, la forme même de ce front, très reconnaissable avec ses "angles droits", l'esquisse des trois mèches qui se détachent dans la partie médiane, enfin le mouvement des mèches sur la tempe gauche, qui remontent vers le haut en boucles souples, tous traits distinctifs que l'on retrouve sur la plupart des répliques du type. Le type Formies est représenté par l'immense majorité des portraits d'Antonin connus à ce jour (403) ; il fut pour cette raison longtemps considéré comme le type unique de l'iconographie de l'empereur, mais une récente étude de C. Evers a prouvé l'existence d'un premier type distinct de celui-ci, représenté à ce jour par quatre répliques seulement, qui, en raison de sa parenté formelle avec le dernier type de l'iconographie d'Hadrien (404), doit être mis en relation avec l'adoption d'Antonin peu avant la mort de ce dernier (405). Le "type Formies" aurait donc été créé seulement quelques mois plus tard, lors de l'avènement en 138 ap. J.-C. Il est resté en vigueur durant la totalité du règne d'Antonin, de sorte qu'il est, en toute rigueur, impossible de préciser la date de fabrication de l'exemplaire de Béziers au sein de la période allant de 138 à 161 ap. J.-C. 395.J.-Ch. BALTY - D.CAZES, 1995, p. 117. 396.M.WEGNER, 1980, p. 121 :« Etwa nicht antik? Ikonographisch wertlos ». 397.F. BRAEMER, 1999, p.52. 398.P.ZANKER, 1985, p.39. 399. Il ne s'agit pas de pierre locale, contrairement à ce qu'a noté P.ZANKER, 1983, p. 39 :« aus einem lokalen Stein gearbeitet ». 400.J-Ch.BALTY - D.CAZES, 1995, p. 114. 401.F. BRAEMER, 1999, p.52. 402.J.-Ch.BALTY D. CAZES, 1995, p. 115. 403.Soit plus d'une centaine d'effigies. 404.Le type Busti 283, sans doute créé à l'occasion des vicennalia de l'empereur en 137 : C. EVERS, 1994, p.259-266. 405. Il a sans doute été reproduit pendant cinq mois à peine.
  • 33