Tête de Jupiter Capitolin

Réf. NEsp : NEsp,Fréjus, 2013, 001, p. 3-4 | Réf. Esperandieu : 03-2454
  • Tête
  • Ronde-bosse
  • Marbre
  • Visuelle
  • Marbre blanc translucide à grains fins de type Luni.
  • Ht : 37 cm ; lg : 24 cm ; Ep : 28 cm
  • Ht tête et cou 37 cm (sans le bouchon d'encastrement). Ht tête (avec barbe) 33,5 cm.
  • Grande taille
  • La zone pariétale du crâne montre une calotte hémisphérique piquetée, en retrait de près de 3 cm par rapport au reste de la chevelure. Ce dispositif était destiné à recevoir un élément rapporté (diadème, couronne ou, moins probablement, casque) fixé à la base de l'os occipital par un goujon métallique de section carrée, scellé au plomb.
  • Le nez, brisé, remonté durant l'Antiquité, puis recollé au XIXe siècle, a été restauré en 2000 : élimination mécanique des anciens collages, recollage et masticage des lacunes.
  • 86.1.
  • Fréjus musée archéologique
  • Fréjus, Var (Colonia Pacensis Forum Iulii Octavanorum, Narbonnaise, Salyens )
  • Fréjus, thermes de la Porte d'Orée, avril-mai 1821. Découverte lors des fouilles dirigées par Charles Texier pour la municipalité.
  • 1821
  • Thermes
  • Le traitement raffiné du visage, le rendu naturel des boucles de la chevelure et de la barbe, l'orbite lisse et l'emploi limité du foret constituent des indices pour placer l'exécution de l’œuvre dans le courant du Ier siècle apr. J.-C.

  • D'après Lemoine, Y., Satre S. (collab.), Fréjus, Nouvel Espérandieu IV, Recueil général des sculptures sur Pierre de la Gaule (H. Lavagne dir.), Paris, 2013, p. 3-4.
  • Tête masculine barbue, de taille supérieure à la normale, dont le cou se termine par un bouchon d'encastrement destiné à assembler la tête dans un buste. Quelques légères épaufrures sur les parties saillantes du visage et de la chevelure. Le nez, brisé, remonté durant l'Antiquité, puis recollé au XIXe siècle, a été restauré en 2000 : élimination mécanique des anciens collages, recollage et masticage des lacunes.
  • La tête, un peu inclinée à droite, présente une forme ovale allongée. La zone pariétale du crâne montre une calotte hémisphérique piquetée, en retrait de près de 3 cm par rapport au reste de la chevelure. Ce dispositif était destiné à recevoir un élément rapporté (diadème, couronne ou, moins probablement, casque) fixé à la base de l'os occipital par un goujon métallique de section carrée, scellé au plomb. La chevelure, où l'on note l'utilisation du trépan (diamètre 2 à 4 mm), est abondante et traitée par boucles en volutes en haut-relief. Elle descend jusqu'à la bordure de la nuque en couvrant les oreilles. La barbe calamistrée est constituée de huit rouleaux spiralés verticaux, répartis symétriquement de part et d'autre du menton. La carnation du visage est polie avec soin et donne une expression de plénitude. Le front court est surmonté de deux larges boucles de cheveux retombant en pinces. Les arcades sourcilières sont peu proéminentes, les yeux en amande sont encadrés de paupières formées de fins boudins lisses. Une ride d'expression naissante est visible dans le prolongement de la paupière supérieure. L'arête nasale est étroite et le nez droit. Ce dernier, brisé à plusieurs reprises, a été rétabli en dressant un lit d'assemblage plan sur lequel a été forée une mortaise de section ronde afin d'y encastrer un goujon métallique. La bouche entrouverte offre des lèvres charnues, trait commun à la plupart des représentations de Jupiter Capitolin. Dans le rapport de la Commission municipale à la suite de la fouille de Charles Texier aux thermes du port romain, on note : « Près de la porte du port dite Porte d'Orée [...] une tête de statue [...] en beau marbre blanc antique. La tête d'homme, un peu plus forte que nature, est d'un beau caractère et bien travaillée. Sa base est élégante et ses parties sont dans d'agréables proportions. [...] Parmi les autres fragments qui sont en grand nombre et de diverses formes, se trouvent un morceau de pied, un d'une main ayant un anneau au petit doigt et un d'une épaule qui paraissent appartenir à la même statue que la tête. Ceci peut faire penser que cette statue a été brisée exprès, et il est malheureusement présumable que le monument que l'on décombre a été aussi détruit par la main des hommes et ensuite comblé de débris. » En 1834, Mérimée, écrit : « On en a tiré [des fouilles de la Porte d'Orée] quelques fragments de statues parmi lesquelles je n'ai distingué qu'une tête de Jupiter d'un assez beau style, sculpté à l'effet, comme un ouvrage destiné à la décoration. » Cette tête est connue par de nombreux témoignages littéraires soulignant sa finesse d'exécution ; le plus élogieux (Héron de Villefosse, Thédenat) la qualifie en ces termes : « Certainement une des plus belles têtes antiques sorties du sol de la Gaule. » En 1886, Aubenas, reprenant la citation de Mérimée, confirme sa découverte aux thermes de la Porte d'Orée. En 1928, Donnadieu est le premier à formuler une étude critique discutant de la place de Jupiter dans les thermes. Se demandant si cette tête n'a pas « été transportée dans les environs de la Porte d'Orée, après la ruine des monuments romains », il poursuit ; « Ilsemble bien que la place d'une pareille statue était au Capitole et que nous sommes, selon toute apparence, en présence d'un débris magnifique de la statue de Jupiter Optimus Maximus qui garnissait la niche centrale de la cella du temple. L'indication du lieu de la trouvaille a été donnée par Mérimée qui, fatigué dit-on, paraît avoir examiné les ruines du Forum Iulii assez superficiellement, et sans grand intérêt. Charles Texier, qui a cependant fouillé la Porte d'Orée, n'en dit rien, et il est bien peu probable qu'il n'eût pas jugé opportun de signaler cet admirable fragment de sculpture, alors qu'il ne nous fait pas grâce de la description de menus morceaux de marbre de la décoration ! [...] Les traits du dieu sont pleins de grandeur et de majesté, les cheveux et la barbe sont remarquablement traités. M. Espérandieu, adoptant l'indication donnée par H. de Villefosse et Thédenat, la considère comme une sculpture du commencement du IIe siècle apr. J.-C., inspirée d'un modèle grec du temps de Phidias. Cette date nous paraissant trop tardive, nous avons soumis nos doutes à E. Espérandieu qui a bien voulu se ranger à notre avis : "Aujourd'hui, nous écrit-il, je croirais cette tête, avec vous, non pas de l'époque des Antonins, mais plus ancienne et antérieure à Nerva ; au IIe siècle, on n'eût probablement pas manqué d'indiquer les pupilles des yeux." Il semble bien qu'il faille y voir une sculpture inspirée d'un modèle grec du temps de Phidias, c'est-à-dire de la belle période de l'art grec du Ve siècle av. J.-C. La douceur infinie, la bonté presque souriante qui se dégage du buste du Forum Iulii sont bien dans la manière de Phidias. On trouve quelques-uns de ces caractères, mais combien atténués, dans le Jupiter Verospi et dans celui d'Otricoli, au Vatican, mais nos préférences vont à celui de Fréjus, beaucoup plus que ces derniers, dans les tendances du maître de la première école attique. » En 2000, L. Rivet reprend les considérations de Donnadieu de 1928 et remarque : « Si le lieu de la trouvaille est bien les thermes de la Porte d'Orée, la seule vraie question qui se pose est de savoir si cet élément de statuaire appartient bien à la décoration des thermes ou s'il y a été transporté au moment de leur abandon. La deuxième hypothèse est sûrement à retenir car il s'agit, avec cette tête haute de 0,40 m, d'un Jupiter Capitolin qui, bien évidemment, n'a aucune raison d'être dans ce type de monument puisqu'il appartient indiscutablement à la statuaire d'un temple. » Ce jugement semble le plus plausible. Une confirmation est donnée par le recensement des statues conservées dans les édifices thermaux d'époque impériale mené par H. Manderscheid en 1981 : sur 560 statues, l'auteur ne relève que quatre représentations de Jupiter dans des thermes ; à Carnuntum en Pannonie (Jupiter Dolichenus)(1), à Tunis (Jupiter Sérapis)(2), aux thermes de Timgad (3) et enfin une statue colossale dans les thermes de Cherchel (4). Étant donné que la différence est souvent indécelable entre les visages barbus de Jupiter et de Neptune, il convient de remarquer qu'une identification définitive demeure toujours délicate en l'absence des attributs traditionnels (trident, dauphin, foudre, aigle...), mais nous penchons pour un Jupiter. La tête s'inscrit dans les représentations de Jupiter Capitolin dont le modèle est l’œuvre de l'athénien Apollonios (5), datée du Ier siècle av. J.-C. Ce type connaît de nombreuses répliques à travers l'Empire romain. En Gaule, on peut citer les exemplaires de Béziers(6), de Vienne (7) ou encore de Lyon (8) ; en Italie, le Jupiter d'Otricoli (9), de Priverno (10) ou du temple capitolin du forum de Pompéi(11). Le traitement raffiné du visage, le rendu naturel des boucles de la chevelure et de la barbe, l'orbite lisse et l'emploi limité du foret constituent des indices pour placer l'exécution de l’œuvre dans le courant du Ier siècle apr. J.-C.
  • Commission municipale 1821; Mérimée 1835, p. 254 ; Petit 1865, p. 240-241 ; Lenthéric 1880, p. 348 ; Aubenas 1881, p. XIV et 602-604 ; Héron de Villefosse, Thédenat 1884a, p. 19 (héliogravure) et 20-21 ; Héron de Villefosse, Thédenat 1884b, p. 51-54 ; Aubenas 1886, p. 11-12, n° I ; Espérandieu III (1910), 2454 ; Donnadieu 1926-1928, p. 129-130 ; Blanchet et alii 1932, p. 11, n° I ; Dörig 1964, p. 273, fig. 23-24 ; Février 1977, p. 114 ; Robion 1982, p. 95 ; Rivet et alii 2000, p. 201-207 et 393, fig 368 ; Béraud, Gébara, Rivet 2008, p. 54 ; Moitrieux 2010, p. 1084 ; CAG 83/3 (2012), 8*, p. 203, fig. 259.

  • 1 Museum Carnuntinum, inv. n° 375 ; Manderscheid 1981, inv. n° 128.
    2 Tunis, musée du Bardo, inv. n° C 1353 ; Manderscheid 1981, inv. n° 366.
    3 Timgad, musée archéologique ; Manderscheid 1981, inv. n° 479.
    4 Paris, musée du Louvre ; Manderscheid 1981, inv. n° 536.
    5 EAA I, s.y. « Apollonios », p. 486-488 (M.-T. Amorelli, L. Guerrini).
    6 Béziers, collection particulière ; Espérandieu IX (1925). 6869.
    7 Vienne, musée archéologique Saint-Pierre, inv. n° R 2001-5-001 ; NEsp. I, Vienne, 2003, n° 001, pl. 1-3.
    8 Lyon, musée de la Civilisation gallo-romaine, inv. n° 2001-0-359 ; NEsp. II, Lyon, 2006, n° 421, pl. 154.
    9 Vatican, Museo Pio Clementino, inv. n° 257 ; Pietrangeli T943; Dörig 1964 ; LIMC VIII, s.v. « Zeus/Iuppiter ». p. 421-470 (F. Canciani).
    10 Vatican, museo Chiaramonti, inv. n° 1808. n° 905 : Andreae et alii 1995, p. 1050. n° 222, XVIII.
    11 Naples, musée archéologique, inv. n° 6266 ; Bieber 1961, fig. 770 ; Cantilena et alii 1989, n° I.